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Axe D2 : Du centre aux périphéries : pouvoirs, élites, provinces

Axe D2 : Du centre aux périphéries : pouvoirs, élites, provinces

Vecteurs et relais, résistances et oppositions

Coordination Lyon 2 – CNRS

Ce programme à trois facettes se propose d’étudier les relations d’un pouvoir central à sa périphérie (au sens à la fois géographique et symbolique) en examinant aussi bien les manifestations que les moyens d’adhésion et de résistance.

VECTEURS ET RELAIS DU POUVOIR

Ce thème de recherche peut regrouper tous ceux qui étudient la dialectique d’un pouvoir central avec les « corps intermédiaires » : élites civiques et municipales, provinciales, classes sociales (sénateurs et chevaliers ; armée) à l’époque romaine ; élites sacerdotales ou autorités écclésiastiques, etc. Il couvre un vaste champ chronologique qui va de l’Égypte pharaonique à l’époque tardo-antique, voire médiévale.

– Les élites égyptiennes : société de cour, administration et temples
Dans la continuité des recherches menées par les égyptologues de l’équipe HiSoMA sur le rôle des élites d’un point de vue administratif, sociologique et religieux, les nouvelles orientations proposées correspondent d’une part à une focalisation géographique sur les régions coptite et thébaine (Haute-Égypte), qui sont par ailleurs au centre de l’activité archéologique des intervenants et de la partie « Cultes et sanctuaires égyptiens » de l’axe C. Cette approche archéologique permet d’ancrer les études projetées sur une documentation en partie de première main, dont les chercheurs assurent eux-mêmes l’édition.

Ces orientations correspondent d’autre part à une poursuite des réflexions sur les modes de hiérarchisation des élites à travers différents critères : titres, marqueurs de statut, position au sein de la cour, monuments votifs, mobilier funéraire. Des études transversales pourront être conduites à partir des travaux menés par les membres de l'équipe et des documents nouveaux qu'ils produisent autour de deux problématiques : les élites provinciales dans les régions thébaine et coptite, les hiérarchisations et l’auto-représentation des élites (sociologie des élites, société de cour et courtisans ; élites sacerdotales).

L’armée romaine (C. Wolff)
Aux époques républicaine et impériale l’armée constitue un instrument de pouvoir particulièrement efficace, mais qui peut se révéler à double tranchant : si elle assure la pérennité de l’Empire, il lui arrive également de représenter une menace pour les autorités. Le cas des prisonniers de guerre, aussi bien les prisonniers des Romains que les prisonniers romains capturés par leurs ennemis, sera étudié. Un congrès sur l’armée romaine se tient d’autre part à Lyon tous les quatre ans ; après le congrès de 2010 qui a porté sur « Le métier de soldat dans le monde romain », le thème du congrès de 2013 reste à fixer.

– Le monnayage comme medium d’expression de la fierté civique
Sur l’expression de l’appartenance civique, les travaux de J. Dalaison, B. Rémy et F. Delrieux sur le monnayage provincial romain mettent en lumière le rôle croissant que joue le monnayage comme nouveau medium d’expression de la fierté civique (néocories, voyages impériaux, jeux), au moment même où son expression épigraphique (évergétisme, etc.) est en chute libre. Sur l’armée et les provinces, les recherches numismatiques (Kaisergeschichte, histoire militaire, extensions et rétractations territoriales, invasions barbares et campagnes impériales) rencontrent les préoccupations des épigraphistes et historiens du CEROR travaillant sur l’époque impériale (F. Bérard, C. Wolff, N. Laubry).

Sur Lyon plus particulièrement, capitale des Gaules, siège de l’atelier monétaire principal de l’Empire sous les Julio-Claudiens et principal atelier d’Occident au IIIe siècle, les inventaires épigraphiques (F. Bérard) trouvent un écho dans les inventaires numismatiques (M. Amandry, S. Estiot, G. Gautier, Le monnayage de l’atelier de Lyon (43 av. J.-C. - 413 apr. J.-C.). Deuxième Supplément, Numismatique romaine 21, Wetteren, 2003). Sur le maillage du territoire (mise en place, à partir de la seconde moitié du IIIe siècle, d’un réseau d’ateliers monétaires au plus près de son principal consommateur, l’armée, préfiguration de la réorganisation provinciale, administrative et militaire de Dioclétien), l’apparition de capitales régionales (Trèves, Antioche) répondant à l’organisation polycéphale du pouvoir (Dyarchie/Tétrarchie), et jusqu’aux questions d’équipement militaire, les zones de contact sont nombreuses.

RÉSISTANCES ET OPPOSITION AU POUVOIR

De même sur la « mise à l’épreuve » des sources historiographiques antiques (Histoire Auguste, Zosime, fragmenta et excerpta des historiens byzantins) à la lumière des témoignages épigraphiques et numismatiques. Sur l’historiographie « mythifiée » telle que la pratique l’Histoire Auguste, expression nostalgique d’une classe sénatoriale sur la défensive et désormais écartée du pouvoir au profit des administrateurs équestres et des généraux issus du rang, les études prosopographiques sur le personnel militaire ou les études philologiques sur la Quellenforschung autorisent, comme les recherches numismatiques, un certain nombre de contre-épreuves. 
Sur la réflexion sur le même et l’autre, le civilisé et le barbare, en général sur les réactions, non plus centripètes, mais centrifuges à un pouvoir central, les recherches sur les « marges » peuvent rassembler ceux qui travaillent sur les marginaux : brigands, prisonniers (C. Wolff), « tyrans » et usurpateurs, empires rebelles (S. Estiot ; V. Drost sur Maxence), révoltés et martyrs (Sources Chrétiennes), comme ceux qui travaillent sur les « interfaces », les états-tampons jouant sur l’antagonisme de deux impérialismes.

HIÉRARCHIES SOCIALES ET CRITÈRES DE DIFFÉRENCIATION : LES ACTEURS DU POUVOIR À ROME

Ce programme se propose d’étudier plus spécifiquement les acteurs du pouvoir, que ce soit au niveau local (élites municipales), au niveau provincial (gouverneurs et personnel du gouverneur ; armée) et enfin au niveau suprême de l’administration impériale (l’empereur et son entourage ; hauts fonctionnaires ; élites militaires). Ce programme peut s’inscrire dans le temps long, et montrer la lente élaboration de la structure hiérarchisée de la société romaine (travaux sur la période républicaine de V. Hollard) jusqu’à la période tardive, plus particulièrement étudiée par B. CabouretS. Estiot, et des doctorants (Cl. Fauchon, E. Güven).

À partir de la documentation disponible pour les cités orientales, et en particulier Antioche, la Syrie du Nord et l’Asie Mineure (sources païennes, mais aussi correspondances des Pères de l’Église, sans oublier les sources juridiques), on peut mener des études prosopographiques qui éclairent la composition du groupe des acteurs de la vie administrative et politique, locale ou régionale. L’utilisation de la démarche prosopographique est ici essentielle. On devine les stratégies familiales, les plans de carrière et les réseaux que créent, en suivant de subtiles hiérarchies, différents types de liens, solidarités de culture commune, mais aussi liens de clientèle, de patronage ou encore d’hospitalité. Les comparaisons régionales, et notamment avec l’Afrique romaine (travaux d’A. Groslambert) et la Gaule romano-barbare (B. Bureau), pour l’étude des mutations (ou permanences) des institutions et des acteurs de la gestion locale – et ce toujours en rapport avec le pouvoir impérial – se sont avérées particulièrement fructueuses et seront poursuivies.

L’étude des critères de différenciation sociale et des fondements de la domination aristocratique pose la question de la culture et du système de valeurs qui sous-tend les exigences sociales et politiques. Aussi les travaux sur l’identité romaine et la culture gréco-romaine (l’hellénisme qui irrigue la culture romaine, travaux d’Y. Roman) sont-ils fondamentaux pour apprécier le fonctionnement et l’idéologie qui les informent. Les réflexions sur les rapports de pouvoir entre le populus et les dirigeants aristocratiques (travaux de V. Hollard sur le rôle effectif du peuple à la fin de la République romaine) en sont aussi des éléments fondamentaux ; leur font écho les études qui, à propos des sociétés de l’Empire tardif, portent sur les factions, les groupes de pression et d’opinion qui s’expriment dans les grandes occasions publiques : spectacles comme les courses de l’hippodrome, les plus connus ; mais aussi rassemblement des foules chrétiennes (travaux de Cl. Fauchon), comme l’étudient en particulier les spécialistes du christianisme. On atteint là une articulation avec le thème qui s’intéresse plus particulièrement aux résistances et aux formes de réactions face au pouvoir.