Projet scientifique Axe D | Édition de sources et de corpus textuels | Épigraphie
Séminaire de recherche du laboratoire organisé par Julien Aliquot (CNRS) et Patrice Faure (Lyon 3)
Un mardi par mois de 17h à 19h, MOM, salle Reinach
L’épigraphie consiste en l’étude des textes inscrits sur des supports imputrescibles (pierre, métal, céramique, etc.). Au croisement de l’histoire, de l’archéologie, de la philologie et de la linguistique, elle est indispensable à notre connaissance des mondes anciens. La forte implication d’Hisoma dans ce domaine remonte à la volonté de Jean Pouilloux, fondateur de la Maison de l’Orient et de la Méditerranée, de créer à Lyon un pôle de recherches majeur dans le champ des études épigraphiques. Aujourd’hui, l’engagement du laboratoire est autant le fruit de travaux sur les archives des différents projets que d’opérations de terrain conduites de l’Europe au Proche-Orient, en passant par le Maghreb, la Grèce et l’Égypte.
Interdisciplinaire, le séminaire d’épigraphie grecque et latine est conçu comme le point de rencontre de ces activités. Il se poursuit de manière régulière depuis sa renaissance en 2014, à raison d’une séance de deux heures par mois, soit 20 heures en tout pour les dix séances programmées de septembre à juin. Des invités extérieurs français et étrangers y contribuent à part égale avec les chercheurs et les doctorants du laboratoire Hisoma. Inscrit au programme du master Mondes anciens (depuis 2017) et de l’École doctorale Sciences sociales de l’Université de Lyon (depuis 2022), il constitue non seulement un espace de discussion et de débat autour de l’édition de documents connus ou inédits, mais aussi l’un des lieux d’expérimentation et de réflexion sur l’évolution en cours des pratiques éditoriales dans le domaine des humanités numériques.
• 24 septembre 2024
Le miraculé de Baitokaikè et autres inscriptions religieuses de la Syrie côtière
Julien Aliquot (CNRS, Hisoma)
Dans le cadre du programme de recherche international des Inscriptions grecques et latines de la Syrie (IGLS), une série d’inscriptions religieuses a été relevée sur le littoral et sur le versant maritime des montagnes côtières de la Syrie actuelle. Ces documents d’époque romaine sont ici publiés en suivant une progression du nord au sud, depuis les confins du territoire de Laodicée-sur-mer jusqu’à la pérée d’Arados. 1) Des ex-votos de Laodicée consacrés au dieu très haut sont rapportés au culte de Zeus Kasios sur le sommet du mont Casius. 2) La dédicace errante à Apollon Remthènos d’une collection privée est mise en relation avec Rhamitha, prédécesseur de la cité de Laodicée. 3) Une inscription conservée au musée de Ṭarṭūs commémore la construction d’un temple urbain dans la cité phénicienne de Gabala. 4) Dans la pérée aradienne, le dossier épigraphique de Baitokaikè s’étoffe de trois nouvelles dédicaces. La réédition du récit de guérison provenant de ce sanctuaire villageois donne aussi l’occasion de reconsidérer l’interprétation du nom du site. 5) Une dédicace de Iamoura (Yaḥmūr) rappelle la construction du temple et des portes d’un sanctuaire de Kronos sous le règne de Marc Aurèle et Lucius Vérus. Dans l’ensemble, le panorama met en évidence l’intégration des hauts-lieux et des sanctuaires villageois de la Syrie côtière dans des réseaux où les cités du littoral occupent une place centrale depuis l’époque hellénistique.
• 12 novembre 2024
Épitaphes de soldats de l’armée romaine tardive sur le Bas-Danube
Dan Dana (CNRS, Hisoma), Maxime Emion (Université Savoie Mont Blanc)
L’épigraphie tardo-antique fait toujours figure de parent pauvre des études historiques sur le monde romain, y compris dans le domaine militaire. À partir d’un choix d’inscriptions latines et grecques, la séance montrera l’intérêt de reprendre le dossier de l’épigraphie funéraire des soldats de l’armée de l’Empire tardif dans quatre provinces situées au nord des Balkans (Mésie Première, Dacie Ripuaire, Mésie Seconde, Scythie). Grâce à plusieurs missions épigraphiques récemment conduites dans les musées de Serbie, de Bulgarie et de Roumanie, et grâce au traitement critique de la documentation, plurilingue et très éparpillée, des résultats et des pistes de recherches sont d’ores et déjà visibles : en plus d’améliorer les éditions antérieures ou d’exploiter des textes absents de la bibliographie scientifique, voire des inédits, la connaissance des soldats et de leurs familles s’affine par l’étude de l’iconographie, de la paléographie, de la langue, de l’onomastique et de la diffusion du christianisme, selon une approche touchant plus généralement à l’histoire sociale de l’Antiquité tardive.
• 26 novembre 2024
La cité crétoise de Lykastos à la lumière des documents épigraphiques
Alcorac Alonso Déniz (CNRS, Hisoma)
Mentionnée dans le Catalogue des vaisseaux de l’Iliade (II, 647), la cité crétoise de Lykastos avait déjà disparu comme entité autonome au ier siècle av. J.-C. Sa localisation, qu’elle soit à l’est ou à l’ouest du mont Iyt(t)os, reste débattue, ainsi que son identification possible avec le toponyme ru-ki-to dans les documents en linéaire B de Cnossos. Toutefois, son histoire au Ier millénaire av. J.-C. peut être partiellement reconstituée grâce aux sources épigraphiques et à des témoignages indirects. La publication en 2023 de deux décrets émis par la cité d’Eurômos de Carie en l’honneur de Podilos et de son frère Charmadas, officiers crétois originaires de Lykastos et enrôlés dans l’armée macédonienne d’Antigone III Dôsôn, offre l’occasion de réexaminer plusieurs questions historiques, notamment la chronologie de la destruction de la cité et son rôle dans les rivalités entre les États crétois durant le dernier quart du iiie siècle av. J.-C.
• 17 décembre 2024
Des ostraca et une inscription : découvertes récentes de la MAFDO à Ghozza et Dayr al-Atrash
Laura Aguer (IFAO), Hélène Cuvigny (CNRS, IRHT)
Lors de la saison de 2024, la Mission archéologique française du désert Oriental (MAFDO), dirigée par Maël Crépy (CNRS, Hisoma), a poursuivi de front la fouille du village ptolémaïque de Ghozza et celle du fortin romain de Dayr al-Atrash, situé à quelques kilomètres de là. Ghozza fut occupé par les travailleurs qui exploitaient les mines d’or de la région au début de l’époque lagide. De nombreux ostraca, en grec et en démotique, y ont été mis au jour. Parmi ceux-ci, un dossier se distingue. Il est constitué de documents en grec adressés à un certain Asklèpiadès, sans doute un administrateur des mines. Ces documents sont riches en informations sur le fonctionnement de l’exploitation locale, en particulier sur les besoins logistiques et techniques qu’elle implique et sur les conditions de travail des mineurs. Probablement fondé sous Domitien, le praesidium de Dayr al-Atrash servait de halte aux convois qui allaient et venaient entre le Nil et le Porphyritès – sans doute aussi la mer Rouge à partir du moment où fut construit, vers 308, le fort côtier d’Abū Shaʾr. D’après les ostraca et la céramique, Dayr al-Atrash semble avoir été abandonné au iiie s., pour être occupé à nouveau pendant quelques années entre la fin du ive et le début du ve s. Aussi avons-nous été stupéfaits d’y découvrir deux fragments d’une étonnante inscription de la Première Tétrarchie. Le séminaire sera l’occasion de présenter l’ensemble de ces trouvailles textuelles.
• 14 janvier 2025
Vicani et notables dans la cité de Vienne (Gaule Narbonnaise) au regard de nouvelles inscriptions
Patrice Faure (Lyon 3, Hisoma), Elio Polo (Archeodunum, ArAr)
La découverte d’une série d’inscriptions en remploi, lors de fouilles conduites en mars 2023 sur le site du Jardin de Cybèle à Vienne, apporte de nouvelles données sur la place et le rôle des notabilités locales dans les réseaux de pouvoir du premier siècle apr. J.-C. Le dossier offre également matière à réflexion sur les hommages adressés aux membres des élites viennoises par les différentes communautés de la plus vaste cité de la Gaule Narbonnaise.
• 4 février 2025
L’aigle et la corbeille : à propos des inscriptions funéraires du Moyen Euphrate
Jean-Baptiste Yon (CNRS, Hisoma)
Les stèles funéraires d’époque romaine de la région du Moyen Euphrate sont bien reconnaissables, grâce à leur décor (aigle, corbeille ou portrait) et à leur formulaire répétitif. Réparties entre quelques sites principaux (Zeugma et Hiérapolis-Membij principalement) et les zones rurales qui les entourent, mais souvent connues hors contexte (commerce des antiquités, collections anciennes), elles ont souvent été confondues dans les publications, entre elles et également avec celles de Palmyre ou d’autres zones voisines. Pourtant, des études plus approfondies ont montré qu’on pouvait affiner la typologie, en s’appuyant sur l’iconographie et l’épigraphie, mais aussi dans une moindre mesure sur l’onomastique. L’objet du séminaire sera donc d’en présenter les grandes catégories, en précisant les critères d’attribution.
• 11 mars 2025
Avenches/Aventicum : bilan archéologique et épigraphique
Denis Genequand (Aventicum), Christophe Schmidt Heidenreich (Université de Genève)
Chef-lieu de la cité des Helvètes, puis colonie latine, Aventicum a fait l’objet de recherches depuis le xviie siècle. Le site archéologique et ses abords sont relativement bien connus sur le plan archéologique et des fouilles préventives, reconduites chaque année, amènent régulièrement leur lot de nouveautés, notamment sur les origines de la ville. Cette communication sera l’occasion de présenter un bilan des connaissances sur la cité, puis d’aborder son important dossier épigraphique, sans cesse enrichi par les découvertes effectuées lors des fouilles, pour l’essentiel de l’instrumentum domesticum (bague, jeton, etc.), mais aussi par des relectures récentes d’inscriptions venues alimenter des débats toujours en cours.
• 8 avril 2025
Nouvelles inscriptions latines de Mayence
Ulrike Ehmig (Berlin-Brandenburgische Akademie der Wissenschaften)
Au cours des dernières décennies, une série d’inscriptions latines, qui n’ont pas encore toutes été publiées, ont été trouvées à Mogontiacum (Mayence) dans des contextes divers. Dans le cadre d’une convention avec le service archéologique de Mayence, ces documents font l’objet des études qu’ils méritent et d’une première édition. La séance donnera l’occasion de présenter les nouvelles publications et d’étudier plus en détail une inscription religieuse métrique actuellement sous presse.
• 13 mai 2025
Une donation de terres à un particulier par les citoyens de Pythoion (Thessalie)
Richard Bouchon (Lyon 2, Hisoma)
La séance, animée en collaboration avec Isabelle Pernin (Université Grenoble Alpes, Luhcie), sera consacrée à la présentation d’une inscription mise au jour lors de la fouille du sanctuaire d’Apollon Pythios au pied du versant occidental du mont Olympe, dans la Tripolis de Perrhébie. Cette stèle opisthographe gravée au iiie s. av. J.-C. porte la décision des citoyens de Pythoion d’accorder à titre de propriété patrimoniale une série de terrains à un certain Timogénès, qui les exploitait déjà, ainsi que la liste d’une trentaine de témoins de ce transfert de propriété. On prêtera une attention particulière à la forme de la donation foncière et aux questions de topographie, de toponymie et d’onomastique que soulève ce document inédit.
• 3 juin 2025
De l’Égypte à la Cyrénaïque, dialogue entre papyrus et inscriptions
Catherine Dobias-Lalou (Université de Bourgogne), Antonio Ricciardetto (CNRS, Hisoma)
Ce séminaire offre une occasion rare d’établir un dialogue entre épigraphie et papyrologie hors d’Égypte, où il existe de façon constante, et plus précisément dans la partie occidentale de la Marmarique, une région située entre la Cyrénaïque et l’Égypte, qui tire son nom du peuple des Marmarides. Après une brève présentation des sources littéraires mais surtout épigraphiques relatives à cette région, on montrera, par l’examen de pratiques graphiques, que l’épigraphie cyrénéenne avait adopté plusieurs usages de la chancellerie lagide. On présentera ensuite le P.Vat.gr. 11, conservé à la Bibliothèque Vaticane, contenant des portions de deux documents administratifs relatifs à la Marmarique (début du iiie siècle apr. J.-C.) et dont le verso a été employé pour copier le traité Sur l’exil de Favorinos d’Arles (c. 80-c. 160 apr. J.-C.). Les documents du recto sont extrêmement précieux car ils contiennent une foule d’informations géographiques, socio-économiques, historiques, linguistiques, lexicologiques ou métrologiques. Ils attestent ainsi de nombreux mots absents de la documentation papyrologique grecque d’Égypte, mais connus par les inscriptions de Cyrénaïque. C’est le cas du lexique de la géographie physique, qu’on illustrera par l’examen de deux substantifs : νάπη « oued » et βουνός « colline ». Comme on le montrera en conclusion du séminaire, ces textes constituent également une source exceptionnelle pour la connaissance des anthroponymes libyques ou présumés tels.